Très chère ville de Rennes,
Quelle ne fut pas ma stupeur ce matin en apprenant que dimanche, demain donc, tu comptais installer un grand écran sur la place de l’Hôtel de Ville pour diffuser la soirée électorale. Que tu diffuses au sein de tes salons sur des écrans les résultats des bureaux de vote rennais, passe encore. Que tu diffuses sur ces mêmes écrans les émissions des chaînes de télévision nationales, pourquoi pas.
Mais quel est l’intérêt d’installer un écran géant et d’abreuver la population ? je formule plusieurs hypothèses, sans qu’aucune ne soit satisfaisante à mes yeux…
– tu es fière des résultats obtenus dans ta ville au premier tour et tu espères secrètement que ton candidat favori, F. H. pour ne pas le citer, sera élu. Auquel cas, tu veux pouvoir admirer le triomphe du candidat dont tu soutiens fièrement les couleurs sur un écran 6 mètres par 3. La grandeur et le monumentalisme de l’image rendront-ils plus grande cette victoire à tes yeux ? Et si ton candidat n’était pas élu ? parce que, quand même, sans vouloir briser ton optimisme, rien n’est joué…
– tu as succombé aux sirènes de la vitrine et de l’image, du monumentalisme et du gigantisme. Pour toi, la politique est un spectacle et se doit donc d’être (sur)affichée en place publique, version XXL, histoire que tout le monde en profite, qu’on en prenne plein les yeux (à défaut de prendre des décibels plein les oreilles dans les cafés-concerts dont tu approuves secrètement la fermeture…).
– tu es tellement sûre de la victoire du candidat socialiste que anticipes le résultat. Sans craindre les dérapages sur le pavé avec des opposants éventuellement déçus en cas de défaite du candidat qu’ils soutiennent. Mais je sais que tu es prévoyante et que tu auras pris la peine de convoquer des escadrons de sécurité pour éviter tout débordement. Tu es devenue la reine de la convocation des petits hommes bleus dans l’espace public ces derniers temps… et la reine de le provocation par là-même.
Bref, Rennes, tu me déçois. Et pourtant, je partage d’assez près ta couleur politique. Et pourtant, je vante tes mérites et ta douceur de vivre en Bretagne, en France et en Navarre. Mais là, je ne te comprends pas. Et je n’approuve pas ta décision.
Au-delà de l’aspect purement politique (et de fierté assez déplacée), je n’apprécie pas cette décision car elle renforce cette politique spectacle tout à fait pitoyable à laquelle on assiste depuis quelques temps. Je te pensais plus fine et plus subtile. Mais non, tu reprends tes sabots de jolie bretonne campagnarde et tu fonces, les yeux fermés. En posant la cerise sur le gâteau de ce petit cirque électoral avec un écran géant, comme pour une manifestation sportive, un show culturel…
Et puis ta décision, elle a évidemment un coût financier. Et j’estime très sincèrement que mes impôts locaux doivent servir à des choses plus utiles et intelligentes. Qui paye cet écran géant ? Qui finance ce déballage politique ?
Alors si tu cherches à nous réconcilier avec la politique au sens premier du terme, l’organisation de la cité, organise-toi, mais sans esbroufe. Tente d’impliquer tes administrés de façon plus subtile plutôt que de les coller devant un écran. Un peu comme on donnerait de la confiture à des cochons. Je te trouve un faux-air de Patrick Le Lay d’un seul coup. Et franchement, ça me donne envie de vomir. Et d’aller voir ailleurs, à la première opportunité.
En attendant, j’espère que la météo se retournera contre toi et qu’il pleuvra des cordes, des seaux et des hallebardes dimanche soir…
LeeZen, rennaise en colère.